Covid-19 : vacciner ?

Après avoir failli dans la gestion des masques, puis des tests, le gouvernement a mené dans le domaine des vaccins une politique bien chaotique. Sans doute par crainte (en période pré-électorale) de heurter une population rendue méfiante par les errements de toute l’année 2020, le ministère de la Santé s'est hâté lentement, comme s’il était honteux de faire preuve de volontarisme. Il a oublié au passage de préparer dès novembre (comme nos voisins) les infrastructures nécessaires à la vaccination. Puis il a accéléré brusquement, en appelant à l'aide des cabinets "d’expertise" privés comme les multinationales McKinsey et Accenture... pour assurer une de ses missions régaliennes essentielles ! Ajoutons qu’il a tardé à faire vacciner les soignants, premières victimes et premiers propagateurs potentiels du virus, et qu’il envisage maintenant de différer la deuxième injection, indispensable pour une protection efficace.

Entendons-nous bien : notre collectif n’est pas unanime sur ces questions complexes et mouvantes. Mais nous déplorons, toutes et tous, les retards accumulés dans la mise en œuvre de la vaccination pour ceux/celles qui le souhaitent.

Nous sommes d’accord pour critiquer la toute-puissance du "Big Pharma" et pour faire preuve de vigilance en matière de santé, compte tenu des scandales sanitaires du passé (Thalidomide, encéphalite post-vaccin antivariolique, sang contaminé, Distilbène, "vache folle", Chlordécone, Mediator) et du manque de transparence avéré des laboratoires et des autorités sanitaires (Levothyrox). Mais nous sommes d’accord aussi sur le fait que les allégations de scléroses en plaques provoquées par la vaccination d’ados contre l’hépatite B se sont finalement avérées infondées, et nous savons que si l’espérance de vie a doublé en France en deux siècles, c’est en grande partie grâce aux vaccins contre la variole (éradiquée), la tuberculose, la poliomyélite, la diphtérie, le tétanos… qui ont provoqué tant de souffrances.

Certain·e·s d’entre nous ont hâte de pouvoir se faire vacciner (et s’inscriront dès que possible), d’autres ne souhaitent pas le faire (dans l’immédiat ou jamais), et tou·te·s ont de bonnes raisons, qu’il s’agisse de protéger soi-même, son entourage, la collectivité… ou inversement de laisser le vaccin à de plus fragiles que soi, de ne pas exposer ses enfants à une survaccination, de compter sur de prochaines alternatives au vaccin, de garder sa liberté, d’aller au bout de ses principes philosophiques, ou de ne pas se retrouver "fiché" dans le Health Data Hub : lire ici le communiqué du Syndicat de la Médecine Générale. Chacun comprend bien que les mesures-barrières doivent être maintenues de toute façon, que le rapport bénéfice-risque (notion clé en matière de vaccination) peut être difficile à évaluer, et qu’il ne faut pas hésiter à demander conseil à des personnes compétentes.

TOUS, NOUS NOUS OPPOSONS RÉSOLUMENT À L’IDÉE D’UNE VACCINATION OBLIGATOIRE contre la Covid-19. Mais nous ne comprenons pas pourquoi, en France, tant de personnes fragiles ont été privées de la possibilité de se faire vacciner entre fin décembre et mi-janvier, alors que des centaines de milliers d’autres étaient immunisées en Allemagne et en Grande-Bretagne et que le très contagieux "variant" B.1.1.7 gagnait du terrain. S’il fallait, bien sûr, recueillir un consentement sans ambiguïté des personnes vaccinées, cela ne devait pas se payer de plusieurs jours de pagaille, d’irresponsabilité, de paperasse et de retards inexcusables.

Certes, les vaccins disponibles aujourd’hui ne sont pas sans défaut : ils sont coûteux, se conservent difficilement et imposent une infrastructure lourde (ex. "super-congélateurs" pour le vaccin Pfizer). Ils sont issus d’une technique assez nouvelle (bien qu’explorée depuis une trentaine d’années), celle de l’ARN messager, sur laquelle on a le droit d’exprimer quelques doutes. Enfin, ils ont le grand défaut de ne pas être français, ce qui défrise probablement notre gouvernement... mais celui-ci prend-il en compte le fait que Sanofi a licencié de nombreux chercheurs et agents — 400 de plus ont été annoncés ces tout derniers jours — et qu'on en paie le prix ? Quoi qu'il en soit, l’immunisation collective progressive n’est-elle pas préférable aux « stop and go » de l’économie, aux confinements, couvre-feux, privations de liberté, disparitions d’emplois, dégradations de la santé mentale, pertes d’accès à l’éducation et à la culture, et surtout précarisation de multiples populations ? L’expérience acquise dans de très nombreux pays n’est-elle pas encourageante ? Imagine-t-on vraiment qu’"on" nous cacherait quelque chose, à l’échelle du monde entier, sur les "dangers" de ces vaccins inoculés à des millions de terriens ?

Nous espérons, sans en être encore sûr·e·s, que les vaccins actuels n’ont pas pour seul effet de protéger la personne vaccinée, mais aussi celui de la rendre moins – voire non – contagieuse ; nous savons qu'en tout cas, plus il y aura de vaccinés, plus il y aura de place dans les hôpitaux (manquant de lits) pour de nouveaux malades. Il faut donc accélérer le rythme, mobiliser toutes les forces disponibles et se montrer exigeant face aux géants de la pharmacie ; pour l'instant, la Commission européenne n'a pas donné suite à la demande d'eurodéputés de rendre publics les contrats avec les labos...

À vrai dire, la vaccination anti-Covid doit être replacée dans le contexte mondial : si les pays tempérés ont été jusqu’à présent les plus touchés par la maladie (peut-être tout simplement pour des raisons climatiques) et ont connu le plus de décès (sans doute à cause de leur structure par âges : pourcentage élevé de seniors), les pays pauvres d’Afrique, d’Asie, d’Amérique latine sont de plus en plus gravement frappés par la morbidité, et bien plus que nous par les conséquences sociales de l’épidémie, surtout parmi les jeunes et les femmes. Il est vital pour ces pays que les habitants qui le souhaitent puissent bénéficier AUSSI de la vaccination, sans augmenter les profits des labos, donc à prix coûtant. Sinon, ils risquent de connaître une explosion de la mortalité, de subir la maladie pendant des décennies et d’être coupés durablement du reste du monde.

Nous aurions tort, cependant, de traiter avec mépris des équipes de recherche comme celles de Cuba ou des unités de production comme celles de l’Inde, qui pourraient bien nous surprendre par leur efficacité… et donner une leçon à notre pays, dont la médecine, citée autrefois en exemple, a été soumise depuis quelques décennies aux lois du marché et à d’absurdes politiques de "rentabilité" à court terme, qui l’ont déclassée et expliquent en grande partie nos piètres performances dans la crise sanitaire. Des mesures ambitieuses en matière de vaccination sont, partout, la seule alternative aux restrictions de nos libertés pour voir nos familles, nos amis, aller au cinéma, pratiquer notre sport préféré...

Sur l'histoire des résistances à la vaccination (par Françoise Salvadori, immunologiste et historienne à l'Université de Bourgogne) :
https://planet-vie.ens.fr/thematiques/sante/prevention/la-longue-histoire-des-resistances-a-la-vaccination


Sur le classement mondial de la France (selon Our World in Data, site anglophone de statistiques sur les grands problèmes mondiaux) :

https://ourworldindata.org/covid-vaccinations


Sur le retard français et le vaccin ARN messager (journal de France Inter du 4 janvier, avec comme invité l'immunologiste Steve Pascolo) :
https://www.franceinter.fr/emissions/le-13-14/le-13-14-04-janvier-2021


Sur les échecs de la vaccination en France et leurs responsables (selon Mediapart - site payant) :
https://www.mediapart.fr/journal/france/060121/campagne-de-vaccination-l-histoire-d-un-naufrage?onglet=full


Sur l’impact de la Covid dans les pays pauvres (traduction d'un article de la BBC) :
https://www.bbc.com/afrique/monde-54121783

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