Le changement climatique,
source d'angoisse



Une étude réalisée par une équipe de chercheurs du Royaume-Uni, de Finlande et de U.S.A. auprès de 10 000 jeunes de 16 à 25 ans dans une dizaine de pays, dont la France, fait apparaître que 75 % de ces jeunes pensent que « le futur est effrayant » et que plus d’un jeune sur deux estime que « l’humanité est condamnée ».

Cette étude, financée par l’O.N.G. AVAAZ et publiée le 14 septembre dernier dans le journal scientifique The Lancet planetary health, fait écho à une anxiété des jeunes de plus en plus souvent observée dans les cabinets de psys. Cette anxiété qui se manifeste parfois par une détresse psychique intense a de réelles conséquences sur la vie des jeunes. 45 % d’entre eux estiment que cette crise climatique provoque des sentiments négatifs qui ont un impact sur leur quotidien.

« L’éco-anxiété » désigne des troubles qui peuvent mélanger inquiétude, désespoir, détresse, colère... liés à la conscience du changement climatique et aux catastrophes écologiques qu’il entraîne ou entraînera, et les symptômes peuvent prendre différentes formes : pertes d’appétit, troubles digestifs, insomnies, stress... Les jeunes manifestant cette anxiété ou cette angoisse se projettent dans un futur sans vieillesse du fait d’un possible effondrement climatique. Dans l’étude mentionnée, 39 % d’entre eux affirment hésiter à avoir des enfants.

Au cours de l’enquête, près des 2/3 des jeunes expriment un sentiment d’abandon et même de trahison des responsables gouvernementaux, jugés insouciants de l’urgence climatique. Près des 2/3 des personnes interrogées pensent qu’ils « laissent tomber les jeunes », « mentent concernant l’impact de leur action » ou encore « ignorent leur détresse ». Ce jugement négatif est partagé par 80 % des jeunes Brésiliens. On a en mémoire les mots très durs de Greta Thunberg à l’adresse des dirigeants de la Planète, elle qui a vécu une véritable dépression face au dérèglement climatique : « Je ne veux pas de votre espoir. Je veux que vous paniquiez. Je veux que vous ressentiez la peur que je ressens tous les jours. »

Ce sentiment d’anxiété est d’autant plus fort que les catastrophes climatiques ont été fréquentes, comme aux Philippines (typhons et inondations) ou au Portugal (incendies dévastateurs) ou que les politiques climatiques sont les plus faibles, par exemple au Brésil.

L’éco-anxiété n’est pas "un mal de riches". La précarité n’écarte pas l’inquiétude, bien au contraire. « Les risques d’effet sur la santé mentale s’accélèrent et touchent de manière disproportionnée les plus marginaux » (rapport de l'EASAC, Conseil scientifique des académies des sciences européennes, qui appelle à développer les enquêtes sur ce sujet).

L’anxiété climatique risque de devenir dans les années qui viennent un sérieux problème de santé publique. « Toutes les personnes conscientes qu’il n’y a pas de planète B sont ainsi susceptibles de devenir éco-anxieuses » (Alice Desbiolles, médecin de santé publique*). Elle ne peut toutefois être assimilée à une pathologie médicale. On peut espérer en atténuer les symptômes, les relativiser ou les sublimer par l’engagement dans l’action, mais seule l’humanité dans son ensemble pourrait, par ses choix actuels et futurs, en éliminer les causes et la faire disparaître. Certains peuvent même considérer l’éco-anxiété comme une « réaction saine » face à cet avenir angoissant ; c’est ce que soutient la pédopsychiatre Leila Benoît qui conduit actuellement une étude avec l’École de médecine de l’université de Yale aux USA. Fenêtre d’espoir qu’il nous faut élargir face à un avenir qui s’annonce de plus en plus sombre.


  * L’éco-anxiété. Vivre sereinement dans un monde abîmé
(Alice DESBIOLLES, Fayard 2020)
 et Éco-anxiété : comprendre l'angoisse liée au changement climatique - Ça m'intéresse (caminteresse.fr)


Pour aller plus loin :


Les jeunes sont terrifiés par la crise climatique… et l’inaction des gouvernants (sur reporterre.net)

Angoisse climatique : un jeune sur deux considère que « l’humanité est condamnée » (sur nouvelobs.com)

Les ados de plus en plus anxieux face à la crise climatique et « à un vide qui déclenche une énorme colère »
(sur bastamag.net)

Et si « l’éco-anxiété » avait du bon ? (sur la-croix.com, qui propose 3 articles en ligne gratuits)

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